L’affaire du Mediator a fait resurgir la notion de prescription hors AMM qui existait, bien sûr, mais restait à l’état latent.
Je ne sais pas s’il existe une définition officielle de prescrire hors AMM, hors Autorisation de Mise sur le Marché. Comme l’AMM se concrétise sous la forme d’un RCP, Résumé des Caractéristiques du Produit, on peut considérer que prescrire hors AMM c’est prescrire en ne respectant pas les spécifications inscrites dans le RCP. C’est donc prescrire en dehors des indications, des contre-indications et des précautions d’emploi (liées par exemple à l’état du malade ou à la prise concomitante d’autres médicaments), de la posologie (trop ou pas assez), de la durée du traitement. Cette définition montre l’importance du RCP et de sa connaissance par les médecins.
Seulement voilà, le RCP de nombreuses spécialités et de génériques n’est pas officiellement accessible. Pour s’en convaincre il suffit de consulter le Répertoire des Spécialités Pharmaceutiques de l’Afssaps et constater que le RCP manque bien souvent. De plus le RCP est davantage rédigé de manière à couvrir les autorités qu’à informer les médecins, d’où certaines ambiguïtés. Les corrections, les mises à jour des RCP, comme la suppression ou l’addition d’une indication ou d’une contre-indication sont faites en négatif, par exemple une indication disparaît, elle n’est plus mentionnée, et ceci sans dire clairement qu’elle a été supprimée. Et les modifications apportées ne sont pas datées.
Revenons au Médiator. J’ai indiqué dans un texte précédent « faut-il remonter au péché originel » les variations des indications du Médiator en fonction des RCP successifs, les indications sont manifestement ambiguës et trompeuses, « chez le diabétique en surcharge pondérale », « diabète asymptomatique », pour laisser une grande latitude de « promotion » au laboratoire, quitte à se retourner contre lui en cas de besoin.
La prescription selon l’AMM doit être la règle mais la prescription hors AMM doit rester une prérogative du médecin. Il ne s’agit pas de faire n’importe quoi, loin de là, mais par exemple de prendre en compte de nouvelles données de la littérature, des indications reconnues à l’étranger. Prenons l’exemple des bêta-bloqueurs, sans oublier les différences qui peuvent exister entre eux : initialement clairement contre-indiqués dans l’insuffisance cardiaque certains sont maintenant parmi les principaux médicaments de cette insuffisance cardiaque ; le propranolol, Avlocardyl*, a des indications qui se sont étendues au cours du temps et l’usage semble avoir précédé les AMM ; peut-on le prescrire dans les hémangiomes infantiles, je ne crois pas qu’il ait l’AMM pour cela, et même dans certains cancers, quand une autre indication existe parallèlement.
La mise en place de contraintes et de sanctions en cas de prescription hors AMM serait plus acceptable si l’ attribution des AMM etait rigoureuse et les RCP accessibles et clairs.
Bonjour,
Le chlorhydrate de propranolol en solution buvable est disponible sous ATU nominative dans le traitement des hémangiomes de l’enfant.
La forme galénique entre en compte, ce n’est pas la forme comprimée qui fait l’objet de cette ATU mais une solution buvable qui bénéficiera probablement d’une AMM dans cette indication seule et d’un statut de médicament orphelin à terme.
Nous en saurons plus quand les résultats des essais cliniques en cours seront publiés.
Extrait du protocole d’utilisation thérapeutique:
Trois essais cliniques sont actuellement en cours en France, étudiant le propranolol dans le traitement
des hémangiomes de l’enfant :
– l’essai V00400 SB 201 «Etude randomisée, contrôlée, en doses multiples, multicentrique,
adaptative de phase II/III, chez les nourrissons présentant des hémangiomes infantiles
prolifératifs nécessitant une thérapie systémique, afin de comparer 4 bras de propranolol (1 ou
3 mg/kg/jour pendant 3 ou 6 mois) au placebo (double aveugle) »,
– l’essai V00400 SB 102 « Etude multicentrique, réalisée en ouvert, en doses multiples, des
paramètres pharmacocinétiques du Propranolol chez les nourrissons présentant des
hémangiomes infantiles prolifératifs nécessitant une thérapie systémique »,
promus par les laboratoires Pierre Fabre.
– l’essai Etude hémangiome – propranolol « Etude clinique randomisée du propranolol versus
placebo dans le traitement des hémangiomes capillaires infantiles » promu par le CHU de
Bordeaux
L’inclusion dans ces essais est à privilégier.
Je vous remercie d’apporter des précisions sur la « position » du propranolol dans l’indication hémangiomes infantiles et je conviens que l’inclusion des nouveaux cas dans les essais en cours est souhaitable. On est dans une phase de transition, pas d’indication, ATU, vers AMM. Il est possible que les choses soient un peu différentes dans d’autres pays car on part d’une découverte française, ce qui est rarement le cas par les temps qui courent.
Je félicite les auteurs pour leur sagacité.