Les ß-lactamines qui comprennent les pénicillines et les céphalosporines, exercent leur effet antibiotique sur les germes possédant une paroi riche en peptidoglycane et sont sans effet sur les organismes dépourvus de paroi, comme les mycoplasmes. Les ß-lactamines, de par leur structure chimique, inhibent les transpeptidases extracytoplasmiques à condition d’entrer en contact avec elles (le lactame est une amide interne provenant de l’élimination d’une molécule d’eau entre un groupe -COOH et un groupe -NH2 de la même molécule.)
Dans les bactéries Gram positif, les différentes ß-lactamines atteignent les transpeptidases à travers la paroi de peptidoglycane déjà constituée ou en cours de constitution. Par contre, dans les bactéries Gram négatif, elles n’atteignent ces enzymes qu’après pénétration à travers les canaux porines de la membrane externe.
Les ß-lactamines dont la structure chimique présente des ressemblances avec celle du D-alanyl-D-alanine se fixent par liaison covalente à un résidu sérine de protéines à activité transpeptidasique, appelées « penicillin binding proteins », ou PBP, qui sont nombreuses et différentes selon les germes. L’inhibition des transpeptidases est à l’origine de l’activation d’hydrolases qui lysent la bactérie.
Certaines bactéries sécrètent les ß-lactamases qui sont des enzymes qui hydrolysent et inactivent les ß-lactamines et sont appelées pénicillinases ou céphalosporinases selon qu’elles détruisent préférentiellement pénicillines ou céphalosporines.
La synthèse de ces enzymes est codée soit par les chromosomes, soit par les plasmides que l’on peut considérer comme des fragments de chromosomes pouvant être transmis par conjugaison. La sécrétion des ß-lactamases peut être constitutive ou induite par inhibition de l’effet d’un répresseur de la transcription du DNA en RNA.
Les différentes pénicillines
Pénicilline G
La pénicilline G est en principe active sur les streptocoques, méningocoques, gonocoques, pneumocoques, leptospires, Corynebacterium diphteriae, tréponèmes et clostridies.
Les espèces productrices de pénicillinases sont résistantes à la pénicilline G, c’est le cas de nombreux staphylocoques et des bacilles Gram négatif.
Sur le plan pharmacocinétique, l’absorption digestive de la pénicilline G est médiocre, inférieure à 30%, car elle est détruite par le suc gastrique acide. Sa demi-vie plasmatique est courte, de l’ordre de 30 minutes. Sa diffusion est essentiellement extracellulaire. Elle pénètre mal dans le liquide céphalorachidien. Son élimination est rénale et peut être réduite par la prise simultanée de probénécide. Pour être efficace, la pénicilline G doit être administrée plusieurs fois par jour par voie intramusculaire ou en perfusion intraveineuse continue.
Pour pallier les inconvénients d’ordre pharmacocinétique de la pénicilline G, on a préparé des pénicillines semi-retard et retard, ayant une plus longue durée d’action, et une pénicilline active par voie buccale appelée pénicilline V, stable en milieu gastrique acide.
La pénicilline reste le traitement de choix des angines aiguës à streptocoques, le traitement devant être poursuivi pendant dix jours.
Pénicillines M
Les pénicillines M, résistantes aux pénicillinases sont l’oxacilline et la cloxacilline. Ce sont des dérivés de l’acide 6-amino-pénicillanique.
Leurs indications sont surtout les infections à staphylocoques bien qu’il existe des souches résistantes, dites méti-R, surtout en milieu hospitalier. Ces souches méti-R sont également résistantes aux autres ß-lactamines.
Pénicillines à large spectre de type ampicilline ou aminopénicillines
Ces pénicillines, ampicilline, métampicilline, bacampicilline, pivampicilline et amoxicilline, sont caractérisées par un spectre plus large touchant les bactéries Gram positif : streptocoques, pneumocoques, et Gram négatif : Escherichia coli, Proteus mirabilis, Salmonella, Shigella, Hemophilus influenzae, Bordetella pertussis, Brucella, Vibrio cholerae, Borelia (maladie de Lyme), non productrices de pénicillinases.
Leurs indications sont les infections dues aux germes précédemment cités, mais il existe des souches résistantes, et la connaissance des résultats de l’antibiogramme est souhaitable pour prescrire l’antibiotique le plus approprié.
L’amoxicilline, bien absorbée par voie digestive en présence et en absence d’aliments, est l’antibiotique de ce groupe le plus prescrit.
CLAMOXYL* Cp, Sirop, Gélules, Sachets, Inj |
Carboxypénicillines et ureidopénicilines
Le spectre d’action de ces dérivés, ticarcilline, mezlocilline et pipéracilline, s’étend à plusieurs germes Gram négatif. Ils sont actifs sur Pseudomonas aeruginosa (pyocyanique), Proteus, Enterobacter. Ils sont présentés seulement sous forme injectable par voie intraveineuse et sont utilisés en milieu hospitalier.
Pivmécillinam et mécillinam
Le pivmécillinam est une prodrogue du mécillinam qui est une amidinopénicilline mal absorbée par voie digestive. Dans l’organisme, le pivmécillinam, donné par voie buccale, est hydrolysé en mécillinam qui s’élimine essentiellement dans l’urine. Il est utilisé dans le traitement des infections urinaires à germes Gram négatif comme Escherichia coli.
Pivmécillinam |
SELEXID*, Comprimés à 200 mg |
Céphalosporines ou céphèmes
Les céphalosporines se distinguent chimiquement des pénicillines par le remplacement du cycle thiazolidine par un cycle dihydrothiazine.
Le spectre d’activité des céphalosporines s’étend vers les bactéries Gram négatif telles que Klebsiella, Enterobacter, Proteus, Serratia, Hémophilus.
Les céphalosporines sont habituellement classées en fonction de caractéristiques, spectre d’activité, résistance aux b-lactamases, ainsi que de la date de leur commercialisation, en céphalosporines de première, de deuxième et de troisième génération.
Céphalosporines de première génération
Il existait plus d’une dizaine céphalosporines dites de première génération mais certaines ne sont plus commercialisées.
Céphalosporines de deuxième génération
Les céphalosporines de deuxième génération comprennent la céfuroxime, le céfamandole et la céfoxitine. Elles sont caractérisées par une meilleure résistance aux ß-lactamases et un spectre d’action plus large, une activité à faible concentration, une bonne diffusion tissulaire.
Céphalosporines de troisième génération
Les céphalosporines de troisième génération sont actives à plus faible concentration que les précédentes et résistent mieux aux ß-lactamases. On peut distinguer celles qui sont actives après administration orale et celles qui sont administrées seulement par voie parentérale.
- Céphalosporine de troisième génération pour voie orale
- Céphalosporines de troisième génération pour voie injectable : elles contiennent de 0,5 à 2 g par unité.
Plusieurs céphalosporines, comme le céfuroxime, le latamoxef, le céfotaxime, la ceftriaxone et la ceftizoxime, atteignent des concentrations efficaces dans le liquide céphalorachidien et sont indiquées dans le traitement des méningites à germes sensibles.
La cefsulodine se caractérise par une activité particulièrement spécifique sur Pseudomonas aeruginosa.
Le choix d’une céphalosporine dépend de son activité vis-à-vis du germe responsable de l’infection, résultat donné par l’antibiogramme, et de ses caractéristiques pharmacocinétiques lui permettant d’atteindre les concentrations suffisantes au niveau du ou des sites infestés.
On considère que la plupart de ces antibiotiques, à concentrations bien inférieures à celles qui inhibent la croissance bactérienne, peuvent diminuer l’infectiosité des bactéries en perturbant leur adhésivité aux cellules du malade.
Carbapénèmes et monobactams
Les carbapénèmes et les monobactams sont des dérivés proches des céphalosporines.
L’imipénem est un carbapénème à spectre large. Il est associé à un inhibiteur de son catabolisme, la cilastatine, qui est un inhibiteur d’une enzyme rénale, la déhydropeptidase I qui métabolise et inactive l’imipénem.
L’ertapénem est aussi un carbapénème, non inactivé par la déhydropeptidase, ayant des propriétés proches de celles de l’imipénem.
Le méropénem, non commercialisé en France mais disponible dans de nombreux pays, est un dérivé des carbapénèmes non inactivé par la dihydropeptidase rénale humaine.
Les ß-lactamines monocycliques, ou monobactams, comme l’aztréonam, sont actifs seulement contre les germes Gram négatif.
Aztréonam (monobactam) |
AZACTAM* Inj |
Ertapénem | INVANZ* Inj |
Doripénem | DORIBAX* Inj |
Inhibiteurs des ß-lactamases
Les inhibiteurs des ß-lactamases commercialisés sont l’acide clavulanique, le sulbactam et le tazobactam.
Acide clavulanique
L’acide clavulanique est produit par Streptomyces clavuligerus. Il a une activité antibiotique faible, mais, à doses relativement élevées, il inhibe les ß-lactamases produites par diverses bactéries. En inhibant les ß-lactamases, il permet aux antibiotiques détruits par les ß-lactamases d’avoir une activité importante. Associé à eux, il étend leur spectre d’activité.
Ceci explique que l’acide clavulanique ne soit pas utilisé seul, mais toujours en association avec un antibiotique comme l’amoxicilline ou la ticarcilline. L’association amoxicilline et acide clavulanique est largement utilisée en thérapeutique.
Sulbactam
En plus de son effet inhibiteur irréversible sur les ß-lactamases, le sulbactam a une activité antibiotique intrinsèque sur quelques germes, mais il est toujours utilisé en association avec les antibiotiques détruits par les b-lactamases. Le sulbactam s’administre par voie parentérale, en perfusion. Il s’élimine par voie rénale.
Il existe un ester sulbactam-ampicilline. L’hydrolyse de la liaison ester dans l’organisme libère le sulbactam et l’ampicilline
Tazobactam
Le tazobactam est un dérivé de l’acide pénicillanique qui a des propriétés proches de celles de l’acide clavulanique et du sulbactam. Il est associé à la pipéracilline.
Effets indésirables des ß-lactamines
Communs à l’ensemble des produits
- Réactions allergiques
- Les effets indésirables des pénicillines et des céphalosporines proviennent du fait qu’elles-mêmes et certains de leurs métabolites peuvent former des liaisons covalentes avec diverses protéines qu’elles rendent allergisantes. Elles jouent le rôle d’haptène et l’association protéine-antibiotique entraîne la formation d’anticorps. Les manifestations cliniques sont le plus souvent de type allergique et peuvent être bénignes, telles que urticaire, éruption, fièvre, éosinophilie, ou graves, telles que bronchospasme, choc anaphylactique. Ce dernier peut être mortel et nécessite une administration immédiate d’adrénaline. Les réactions d’hypersensibilité peuvent se voir chez des personnes qui n’ont pas été antérieurement traitées par des pénicillines ou des céphalosporines et, à fortiori, chez les malades qui en ont déjà reçu en traitement.
- Cependant toutes les manifestations de type allergique ne proviennent pas nécessairement de l’antibiotique lui-même mais parfois d’un produit tel que la procaïne, associé à l’antibiotique, ou encore d’une réaction liée à la libération de toxine bactérienne par destruction des germes.
- Les effets indésirables des pénicillines et des céphalosporines proviennent du fait qu’elles-mêmes et certains de leurs métabolites peuvent former des liaisons covalentes avec diverses protéines qu’elles rendent allergisantes. Elles jouent le rôle d’haptène et l’association protéine-antibiotique entraîne la formation d’anticorps. Les manifestations cliniques sont le plus souvent de type allergique et peuvent être bénignes, telles que urticaire, éruption, fièvre, éosinophilie, ou graves, telles que bronchospasme, choc anaphylactique. Ce dernier peut être mortel et nécessite une administration immédiate d’adrénaline. Les réactions d’hypersensibilité peuvent se voir chez des personnes qui n’ont pas été antérieurement traitées par des pénicillines ou des céphalosporines et, à fortiori, chez les malades qui en ont déjà reçu en traitement.
- Résistance
- La perte d’efficacité des ß-lactamines du fait de l’apparition d’une résistance des germes est un effet indésirable certain. Les bactéries s’adaptent aux antibiotiques de façons diverses :
- blocage de la pénétration de l’antibiotique par diminution du nombre des canaux « porines » situés dans la membrane externe des bacilles Gram négatif
- hydrolyse par les ß-lactamases produites en grande quantité à la suite de l’acquisition de gènes permettant leur synthèse (par plasmides et transposons)
- modification des PBP (Pénicillin-binding-proteins) .
Propres à certaines céphalosporines
Des saignements et des hémorragies avec chute du taux de prothrombine ont été observés chez les malades traités par le latamoxef et le céfotétan qui peuvent manifester un effet de type antivitamine K.
Des réactions de type disulfirame ont été observées chez des malades traités par le céfamandole, le céfotétan, le latamoxef et la céfopérazone lors de la consommation d’alcool.