Auteur : Pierre Allain

Utilisation thérapeutique des anticorps – Immunoglobulines ou anticorps spécifiques

À côté des immunoglobulines polyvalentes, des anticorps spécifiques vis-à-vis d’une cible déterminée, un antigène membranaire d’une cellule, une cytokine, un récepteur, un médicament, un toxique, ont été préparées. Leur action dépend essentiellement de leur cible. Ces anticorps peuvent être d’origine humaine, équine, murine ou chimérique.

Anticorps cytotoxiques anti-rhésus ou anti-D

En agissant sur des antigènes de surface portés par certaines cellules, les anticorps correspondants peuvent conduire à la destruction de ces cellules. C’est le cas des hématies foetales de type Rhésus positif.

Ce sont des IgG anti-D, susceptibles de se fixer à l’antigène D (antigène principal du système Rhésus) des globules rouges qui sont ensuite détruits par les macrophages.

Pendant la grossesse mais surtout pendant l’accouchement, des hématies foetales passent dans la circulation maternelle. Si l’enfant est Rhésus positif et la mère Rhésus négatif, les hématies foetales se comportent comme des antigènes et sont à l’origine d’une immunisation avec apparition d’anticorps anti-D qui, lors d’une grossesse ultérieure, peuvent être la cause d’accidents en interagissant avec les antigènes D.

L’administration d’un anticorps anti-D dans les premières soixante douze heures après l’accouchement entraîne la destruction des hématies rhésus positif et évite l’immunisation.

 

Immunoglobulines anti-D (anti-Rhésus)

NATeAD* Inj Iv
RHOPHYLAC* Inj IM ou IV

Anticorps anti-lymphocytes

Il existe deux préparations anti-lymphocytes humains, l’une obtenue à partir de sérum de cheval, l’autre de sérum de lapin, ces animaux ayant été immunisés contre les lymphocytes humains. Par leur activité lymphotoxique, elles provoquent une déplétion des lymphocytes humains et, ont un effet immunosuppresseur. Elles sont utilisées pour éviter les rejets d’organes greffés.

Immunoglobulines anti-lymphocytes
 

cheval
lapin

LYMPHOGLOBULINE* Inj, perfusionIV
THYMOGLOBULINE* Inj, perfusion IV

Un des effets indésirables de ces immunoglobulines anti-lymphocytes d’origine animale est l’apparition possible vers le huitième jour du traitement d’une maladie sérique, liée à un conflit antigène-anticorps et caractérisée par plusieurs symptômes : fièvre, urticaire, arthralgies. On peut aussi observer un choc anaphylactique, une thrombopénie et une diminution de la résistance aux infections.

Alemtuzumab, anticorps anti-CD52

L’alemtuzumab est un anticorps humanisé de type IGg, produit par génie génétique et dirigé contre la glycoprotéine CD52 qui est présente notamment à la surface des lymphocytes B et T périphériques normaux et malins.

L’alemtuzumab, administré par voie intraveineuse, provoque une lyse des lymphocytes, d’une part par l’intermédiaire du complément et d’autre part par une cytotoxicité cellulaire anticorps dépendante (ADCC = antibody dependant cell-mediated cytotoxicity.

L’indication de l’alemtuzumab retenue par l’AMM est le traitement de la leucémie lymphoïde chronique chez les malades qui ne répondent plus aux autres traitements.

 

Alemtuzumab

Mabcampath*, Inj

Rituximab, anticorps anti-CD20

Le rituximab est un anticorps monoclonal de type IgG qui se lie spécifiquement par son fragment Fab à l’antigène CD20, phosphoprotéine non glycosylée transmembranaire, présent à la surface des lymphocytes B normaux et malins mais non sur celle des cellules précurseurs des lymphocytes B ni des cellules présentatrices de l’antigène. Le fragment Fc du rituximab reste libre et fonctionnel. Par des mécanismes complexes, la fixation du rituximab à l’antigène CD20 provoque des modifications intracellulaires, l’activation du complément et la prise de la cellule B comme cible par les macrophages et les lymphocytes T tueurs (phénomène ADCC : antibody dependent cell-mediated cytotoxicity). De plus, le rituximab sensibilise les lymphocytes B aux médicaments cytotoxiques. Le rituximab est utilisé dans le traitement des lymphomes non Hodgkiniens à cellules B.

 

Rituximab

MABTHERA* inj, perfusion intraveineuse

Ibritumomab tiuxetan, anticorps radioactif anti-CD20

L’ibritumomab tiuxétan est composé d’un anticorps monoclonal dirigé contre l’antigène CD20 des lymphocytes B, l’ibritumomab, lié par une liaison covalente au chélateut tiuxétan qui peut fixer un atome d’yttrium ou d’indium, stable ou radioactif. Dans le Zevalin* l’atome chélaté par le tiuxétan est l’yttrium radioactif Y-90.qui est un émetteur bêta dont la demi-vie est de 64 heures. Le trajet du rayonnement bêta responsable de l’activité et de la toxicité est de l’ordre de 5 mm. Le rôle de l’anticorps est de concentrer l’yttrium radioactif autour des lymphocytes B empêchant ainsi sa diffusion dans l’ensemble des tissus de l’organisme.

 

Ibritumomab tiuxetan

ZEVALIN* Inj, radioactif

L’ibritumomab tiuxétan est utilisé dans le traitement des lymphomes non hodgkiniens à cellules B, CD20 positives. Ses effets indésirables résultent de la présence de l’anticorps et de la radioactivité qui peut provoquer des tumeurs malignes secondaires. Il est administré après une cure préalable par le rituximab .La personne qui manipule ce produit radioactif doit avoir l’autorisation spéciale radio-éléments . Cette méthode de traitement s’appelle la radio-immunothérapie.

Muromonab CD3 , anticorps anti-CD3 des lymphocytes T

Le muromonab – CD3 est un anticorps monoclonal dirigé contre l’antigène CD3 des lymphocytes T humains. Les lymphocytes T étant très actifs dans le rejet d’organes greffés, des anticorps destinés à bloquer leur activité ont été préparés. Il s’agit d’inhiber, soit la molécule CD3 liée au TCR, soit le récepteur TCR lui-même, soit un facteur d’adhésion.

L’antigène CD3 est constitué de protéines membranaires qui interviennent dans la transduction du signal aux lymphocytes T. L’anticorps est une immunoglobuline IgG appelée muromonab CD3. La liaison du muromonab CD3 à l’antigène CD3 des lymphocytes, après une stimulation transitoire et libération de diverses cytokines, inhibe l’activité des lymphocytes T et diminue les réactions de rejet de greffe rénale, cardiaque, hépatique. Il est indiqué en cas de menace de rejet de greffe.

 

Muromonab CD3

ORTHOCLONE OKT3* Inj IV

L’administration de muromonab CD3, anticorps murin, induit la formation d’anticorps anti-muromonab CD3; il se comporte comme une protéine étrangère. La formation d’anticorps anti-muromonab CD3, si elle est importante, exclut sa réutilisation ultérieure. Par ailleurs, il peut entraîner des réactions générales : fièvre, frissons, vomissements, diarrhée, hypotension, collapsus; un dème pulmonaire grave peut apparaître. Il serait susceptible d’induire une prolifération tumorale. Cependant, devant la menace de rejet de greffe, la plupart des effets indésirables du muromonab CD3 peuvent passer au second plan.

Daclizumab et basiliximab, anticorps anti-récepteur IL-2

Le basiliximab est un anticorps monoclonal de type IgG qui se fixe avec beaucoup d’affinité à l’une des trois chaînes, la chaîne CD25 ou TAC, du récepteur de l’interleukine-2 présent sur les lymphocytes T activés. Il se fixe au récepteur sans l’activer et empêchent l’IL-2 d’agir. Il a une longue demi-vie, ce qui permet d’espacer son administration. Ils est utilisé dans la prévention du rejet de greffe rénale.

 

Basiliximab

SIMULECT* Inj IV

Infliximab et adalimumab, anticorps anti-TNF

L’infliximab est un anticorps monoclonal chimérique qui fixe le TNFa a soluble et lié à une membrane et l’empêche ainsi d’agir. Ses indications sont la polyarthrie rhumatoïde, certaines formes de spondylarthrie ankylosante et la maladie de Crohn. Il s’administre par voie intraveineuse. (Voir « TNF, Tumor necrosis factor ».)

 

Infliximab

REMICADE*, Inj

L’adalimumab est un anticorps de type humain qui se lie spécifiquement au TNF et le neutralise. Il est indiqué dans la polyarthrite rhumatoïde.

 

Adalimumab

HUMIRA*, Inj

Bévacizumab, anticorps anti-VEGF

Le bévacizumab est un anticorps monoclonal qui se lie au VEGF et le neutralise. Il est utilisé dans le traitement du cancer colorectal.

 

Bévacizumab

AVASTIN*

Efalizumab, anticorps anti-LFA-1 (CD11a)

L’éfalizumab est un anticorps monoclonal humanisé de type IGg1 qui se fixe à la sous-unité alpha du LFA-1 (Leucocyte-Function-Associated antigen type 1) ou CD11a des lymphocytes. Le LFA-1 interagit avec l’ICAM-1 (InterCellular Adhesion Molecule 1). L’efalizumab est utilisé dans le traitement du psoriasis n’ayant pas répondu aux traitements habituels.

L’éfalizumab a été commercialisé sous le nom de Raptiva* mais en février 2009 son autorisation de commercialisation a été suspendue dans plusieurs pays.

 

Efalizumab

RAPTIVA* Inj SC

Trastuzumab, anticorps anti-HER2

L’oncogène HER2 code une protéine HER2 qui est exprimée en excès au niveau de la membrane plasmique des cellules tumorales du cancer du sein où elle joue le rôle de récepteur à activité tyrosine kinase du facteur de croissance épidermique humain, EGF.

Le trastuzumab (Herceptin) est un anticorps monoclonal recombinant « humanisé » qui en se fixant à la protéine HER2 la neutralise et freine ainsi la croissance tumorale dans les cancers du sein HER2 positifs.

L’élévation de la concentration du récepteur HER2 dans le plasma des malades est une indication pour la prescription de trastuzumab.

 

Trastuzumab*

HERCEPTIN*, perfusion intraveineuse

Anticorps anti-digoxine

Il existe un anticorps antidigoxine ne contenant que le fragment Fab, c’est-à-dire celui qui réagit avec l’antigène, le fragment Fc ayant été éliminé.

Administré lors d’une intoxication par la digoxine ou la digitaline, cet anticorps les neutralise et supprime leur toxicité.

 

Anticorps antidigoxine d’origine ovine

Digidot* Inj (Hôpitaux)

Anticorps anti-toxines

Il existe des anticorps contre les toxines libérées dans l’organisme à partir de germes ou introduits dans l’organisme par des animaux venimeux.

Les immunoglobulines antitétaniques existent sous la forme de préparations : d’origine plasmatique humaine, ou d’origine chevaline. Toutefois la protection contre le tétanos doit être assurée par une vaccination correcte, complétée éventuellement par un rappel en cas de plaie, de préférence au sérum antitétanique. Il existe également un sérum antidiphtérique.

 

Sérum antitétanique (d’origine humaine)

GAMMATÉTANOS* Inj

Un sérum antivenimeux d’origine plasmatique équine destiné au traitement des morsures de vipères de France et d’Europe est disponible.

 
Sérum antivenimeux (vipère) d’origine chevaline VIPERFAV* Inj

Une préparation contenant des fragments F(ab’)2 d’immunoglobuline d’origine équine est destinée à neutraliser le venin de Bothrops lanceolatus présent dans la circulation sanguine.

 

Sérum antivenimeux (Bothrops lanceolatus)

BOTHROFAV* Inj, ATU

Comment traiter les morsures de vipères, voir ceci : Treatment of bites by adders and exotic venomous snakes.

Anticorps antivirus

Des immunoglobulines spécifiques peuvent être utilisées pour lutter contre un processus infectieux. Des immunoglobulines d’origine plasmatique humaines possèdent une activité anticorps spécifique contre des antigènes des virus de l’hépatite B ou la rage.

 

Immunoglobulines anti-hépatite B

IVHEBEX* Inj IM et IV

Immunoglobulines antirabiques

IMOGAM RAGE* Inj IM

Le pavilizumab est un anticorps monoclonal dirigé contre la protéine F du RSV ou virus syncitial respiratoire. Il prévient l’extension de l’infection virale en inhibant la fusion de la membrane virale et de la membrane des cellules de l’arbre respiratoire. Il s’oppose aux infections respiratoires à RSV, notamment les bronchiolites du nourrisson et de l’enfant.

 

Pavilizumab

SYNAGIS* Inj

Il existe une immunogbobuline, appelée ticobuline, non commercialisée en France, destinée à la prophylaxie de la méningo-encéphalite à tiques.

Abciximab, anticorps anti-GP IIb/IIIa

Le fragment Fab de l’anticorps monoclonal, abciximab, neutralise le récepteur de la glycoprotéine GP IIb/IIIa (Voir « Antagonistes de la glycoprotéine IIb/IIIa ».).

 

Abciximab

RÉOPRO * Inj, bolus IV puis perfusion

Anticorps anti-IGE

L’omalizumab est un anticorps monoclonal dirigé contre l’immunoglobuline E, à laquelle il se lie et l’empêche ainsi d’agir. L’omalizumab a obtenu une AMM européenne en 2005 sous le nom de Xolair* avec l’indication le traitement de l’asthme allergique sévère.

 

Omalizumab

XOLAIR* Préparation injectable 150 mg