Dans un article du New England Journal of Medicine du 23 janvier 2003, les auteurs arrivent à la conclusion que les personnes dont la concentration plasmatique en vitamine A ou rétinol dépasse 750µg par litre, valeur considérée comme limite supérieure de la normalité, ont un risque 2 à 3 fois plus élevé d’avoir une fracture, notamment du col du fémur, que les personnes dont la concentration en rétinol est plus basse.
Les deux paramètres analysés dans cette étude sont la concentration de rétinol plasmatique et la fréquence des fractures, sans faire le bilan des effets bénéfiques et indésirables de la vitamine A. Dans le même numéro du NEJM, Paul Lips, sous le titre Hypervitaminosis A and Fractures, fait un commentaire du précédent article.
Les résultats de l’étude analysée concordent avec ceux de précédentes études cliniques ainsi qu’avec les données de l’expérimentation animale. Si l’on admet qu’une élévation même modérée du rétinol plasmatique, juste au-delà de la limite supérieure de la normale, est capable d’avoir des conséquences néfastes sur l’os, la question de limiter l’apport de vitamine A chez certaines personnes se pose. Mais chez quelles personnes ?
On ne dispose pas, à ma connaissance, en France et dans d’autres pays européens de données épidémiologiques suffisantes pour situer le niveau des concentrations de rétinol plasmatique des adultes et des personnes âgées. Il semble toutefois que la concentration plasmatique de rétinol soit plus élevée dans les pays nordiques que dans les pays méditerranéens. Le dosage de rétinol dans le plasma qui est généralement fait pour déceler les carences pourrait désormais être utilisé pour déceler les excès. Les valeurs de rétinol plasmatique considérées comme normales se situent entre 300 et 700µg par litre.
Une alimentation abondante et variée comme celle des pays développés apporte suffisamment de vitamine A et même parfois trop. La vitamine A est en effet présente dans la plupart des aliments d’origine animale et végétale et certains aliments comme le foie, notamment de poissons, en contiennent des quantités considérables.
Pour limiter, si nécessaire, l’apport de vitamine A on pourrait donner les conseils suivants :
- éviter de prendre des médicaments fortement dosés en vitamine A
- éviter la prise répétée de spécialités de multivitamines contenant de la vitamine A, parfois en quantités non négligeables
- éviter les aliments enrichis en vitamine A et les aliments connus pour être naturellement très riches en vitamine A.
Il faut rappeler par ailleurs qu’un excès de vitamine A, mais surtout la prise de rétinoïdes, peut avoir un effet tératogène.
Les considérations précédentes ne doivent pas faire oublier qu’il y a à travers le monde des populations chez lesquelles c’est le risque de carences multiples, et en vitamine A notamment, qui domine. La carence en vitamine A peut avoir de graves conséquences, comme la cécité, et son traitement par l’apport d’une dose de charge de vitamine A est évidemment nécessaire.